Ô cher père énigmatique
Son dos courbé, son coeur doué
Il est un être au fond déluré
Ses bras ballants, il émet un chant
Il me regarde, il est important.
Galimatias périodiques, idéal hérétique
Qui es-tu? Ô cher père énigmatique.
Sombre lueur aveuglante, que cherches-tu?
A me détruire? à m'aimer? Au fond, me hais-tu?
Je ne sais encore quel mal te ronge,
De quelle forçe, le chagrin, ton âme éponge
Cependant, que les anges déversent, telles des nuées étranges
J'irai dire à Gabriel, que ton esprit, à travers la mort, s'arrange.
Tu évolues, tu grandis, dans ce monde macabre,
Tu ne bouges pas, vraiment, tu restes de marbre,
Mais que cherches-tu? Je ne comprends pas, Ô cher père énigmatique,
Est-ce une langue inconnue? Est-ce de l'Amharique?
Pourquoi vas-tu si loin? Au confluent de la mer Rouge et du golfe d'Aden?
De ma naissance, dans un cabinet, tu en as fais la tienne.
Tu riais de me voir sortir par là où tu es rentré,
Tu riais, Ô cher père énigmatique, de tes larmes sur le dossier;
Mais qu'en est-il devenu de ce sourire?
Ils sont pour toi, ces mots qui ne sauront jamais dire.
Découché, où es-tu? Maman s'inquiète; sans toi, elle est perdue
Les ordres ne sont point là et tu as disparu pour la première fois.
Se faisant de plus en plus présente, la lueur est revenue,
Elle te cherche mais tu ne l'as suis plus.
Une perche t'a été tendue, mais tu as évité les lois,
Maintenant c'est fini et tu es perdu.
A présent, tu scrutes, de ton île déserte, les recoins des marées salées,
Tu cherches quelque chose, on ne sait quoi;
Un coquillage, une perle, un secret d'autrefois?
Tu cherches sur le sable de mes joues, une danse, que dis-je? un ballet.
Tu cherches avec tes mains, avec tes yeux, avec ton coeur.
Tu cherches tes fils, ta femme, ton ancienne vie
Ton devenir n'est plus, alors je cherche à mon tour, ma mie,
Dans l'espoir que me revienne le bonheur.
Les jours passent et je ne trouve plus que toi pour me manquer,
Les années me lassent et, à travers la mort, tu m'auras aimé.
Tels des phylasis consumés par la chaleur du soleil pénétrante
Ma cage obsolescente finira de congédier ses floraisons bourgeonnantes;
Et enfin, tel un enfant, j'irai te voir, adulte et grand
Sur ton île où se dresse un arbre, qui s'envole au-dessus des autres
Sur ton île qui doit te paraître si déserte
Mais qui est pour moi si bondée; cet arbre, ce sera le notre.
Tu vois? Ô cher père énigmatique, je ne vois plus ta perte,
Elle est comme derrière les feux de notre monde
Elle est comme dans chaque être facétieux qui fonde.
Tu m'as aimé à ta façon précisément, certes,
Aujourd'hui, je sais, que sur ton île, un pull, tu tisses
Et qu'il est pour moi. Et qu'il est pour ton fils.